PROMOTION D’UNE GOUVERNANCE FONCIERE INCLUSIVE PAR L’AMELIORATION DES DROITS FONCIERS DES FEMMES AU SENEGAL »
Depuis le début des années 2000, le Sénégal, à l’instar de la plupart des pays du Sud, est confronté à une demande de terres particulièrement forte, aussi bien sur les terres pluviales qu’irriguées, situées sur le domaine national comme sur celui de l’État.
Selon la loi sur le domaine national (LDN) de1964, qui demeure le seul cadre juridique foncière malgré tout le travail effectué dans le cadre de la CNRF qui reste sans suite depuis 2017, il existe trois domaines fonciers, avec chacun des catégories, au Sénégal : domaine de l’État, domaine privé des particuliers et domaine national.
Selon ce découpage, 95 % des terres du pays appartiennent au domaine national et ne peuvent être vendues ni louées, ou encore données à des étrangers. Cependant, pour ces terres du domaine national, les collectivités territoriales, responsables de l’affectation et de la désaffectation des terres, ne sont compétentes que dans la zone des terroirs. Une situation qui ne contribue pas forcément à sécuriser les droits coutumiers des communautés rurales dans la mesure où l’État peut effectuer des transactions foncières à grande échelle sans informer ni impliquer les populations ni les services compétents locaux, au nom de l’utilité publique. À cela s’ajoute le développement de plus en plus important d’un marché foncier dans lequel les populations par opportunisme, nécessité ou tout simplement peur d’être dépossédées, vendent, voire bradent leurs terres.
Cette ruée vers les terres les plus riches et fertiles du Sud, dont celles du Sénégal, a pris une ampleur sans précédent à partir de 2008, suite à la crise financière économique mondiale qui a poussé les investisseurs à retourner vers l’agriculture.
Au Sénégal, le phénomène des ATGE a pris ampleur avec la mise en œuvre par le gouvernement d’une nouvelle orientation politique qui s’est matérialisée avec les programmes tels que le Retour vers l’agriculture (REVA) en 2006 et la Grande offensive pour la nourriture et l’abondance (GOANA), 2008, dont l’un des objectifs était aussi de lutter contre la migration illégale vers l’Europe. Cette orientation politique privilégiant le secteur agricole comme principal levier de développement se poursuit avec le Plan Sénégal Emergent (PSE) – IPAR, 2010 ; Enda Pronat, 2010 ; CICODEV Afrique, 2011 – qui mise explicitement sur la synergie entre agro-industries et exploitations familiales comme principal levier du développement rural (Bourgoin & alii, 2019).
La vallée du fleuve Sénégal, en particulier le delta, est l’une des zones les plus convoitées du pays. Cette situation découle en grande partie de la politique de l’État du Sénégal qui, à travers des investissements massifs, encourage le développement de l’agrobusiness et fait la promotion de l’agriculture intensive pour l’autosuffisance en riz, des exportations de produits alimentaires et de la création de richesse pour les agriculteurs et le développement de ces territoires.
La zone des Niayes, de par sa position géographique, son potentiel agro-physique très élevé favorable au développement de l’horticulture et ses ressources minières, est aussi particulièrement sollicitée.
Le bassin arachidier, qui, pendant longtemps, a été la zone par excellence de la culture de rente mais familiale, n’échappe pas non plus à cette forte demande des terres pour des activités diverses selon la sous-zone, alors qu’il est déjà confronté à une forte salinisation notamment dans sa partie sud.