Le pastoralisme système d’élevage fondé sur la mobilité des hommes et des troupeaux, est un élément économique important dans les pays d’Afrique Subsaharienne. Il assure environ 50% du PIB agricole de certains Etats et joue aussi un rôle essentiel dans l’alimentation en produits animaux des marchés des villes sahéliennes. Cependant, le pastoralisme (notamment le système d’élevage mobile) se trouve, aujourd’hui, de plus en plus confronté à diverses formes de contraintes d’origine multiples et complexes, un contexte agro climatique particulier mais également des compétitions pour l’accès aux ressources, tant entre éleveurs qu’avec les agriculteurs ou autres usagers du foncier.
La croissance démographique a conduit à une occupation de plus en plus grandissante des espaces anciennement dédiés aux troupeaux transhumants. Dans ce contexte, des terres sont acquises par des promoteurs (immobiliers, agricoles, infrastructurels etc…) aussi bien en zone rurale, qu’en zone urbaine ou périurbaine.. Au cours de la période récente, le phénomène de la conversion des terres pastorales en parcelles d’habitation a pris de l’ampleur dans la zone située à la périphérie de certaines grandes villes du Sénégal .
A titre illustratif, le PNADT, le triangle Dakar-Thiès-Mbour a désormais comme priorité n°1, l’habitat. Ce qui entraine naturellement l’amenuisement continu des zones pastorales et la promotion de « l’élevage en espace clos » .
Les zones à vocation sylvo-pastorale (forêts classées, aires protégées, réserves pastorales, etc.) sont les premières victimes de l’acquisition de terres par de nouveaux investisseurs détenteurs de capitaux (nationaux ou étrangers) .
L’expansion des cultures a entraîné une modification progressive des relations entre l’agriculture et l’élevage, et même si des formes de complémentarité ont été développées, il reste que la cohabitation entre ces deux activités s’est surtout traduite par un accroissement des concurrences autour de l’accès à l’espace.
Une telle évolution est d’autant plus inévitable que la stratégie adoptée par la plupart des agriculteurs consiste à accroître leurs productions par l’extension des surfaces cultivées. Ainsi, tous les espaces susceptibles de faire l’objet d’une mise en valeur par des productions végétales ont été progressivement transformés en champs, sans considération des usages anciens, qui privilégiaient l’utilisation partagée des ressources naturelles ainsi que la préservation de certains espaces ruraux destinés à servir de zones de pâture pour le bétail. En sus, la ruée des sociétés multinationales sur les richesses naturelles disponibles dans les espaces pastoraux de la zone sahélienne (uranium, pétrole, gaz, etc.) contribue à accentuer la compétition entre différents groupes d’acteurs pour l’appropriation des terres .
Les communautés pastorales ne sont pas impliquées dans le processus de consultation, en particulier dans les études d’impact environnemental et social, alors qu’elles constituent les premières victimes de l’implantation des industries extractives qui engendre de multiples impacts négatifs.
Ces évolutions montrent que le pastoralisme est menacé par de nouvelles dynamiques foncières qui, même si elles ne conduisent pas à sa disparition en tant qu’activité caractérisée par des spécificités sociales, économiques et culturelles, tendent à freiner son développement et sa reproduction.
Fréquemment, des différends éclatent et se terminent par des actes tragiques entre agriculteurs et éleveurs. Face à cette dégradation des liens sociaux entre les communautés, la préservation de la paix est placée au cœur du processus de toute négociation afin d’obtenir un usage concerté et durable de l’espace et de ses ressources.
Pour faire face à un tel phénomène, des expériences diverses et variées de sécurisation des espaces pastoraux sont actuellement conduites sur le terrain. La capitalisation des modèles de sécurisation du foncier pastoral testés au Burkina Faso (régions du Sahel et de l’Est), au Niger (région de Maradi et département de Niamey) et Sénégal (département de Podor) a permis de tirer des enseignements utiles pour un changement d’échelle dans la conduite de telles expériences, afin de renforcer les stratégies de prévention des conflits liés à l’accès aux ressources naturelles.
Mais ces différents programmes ont peu abordé jusque-là la question sous-jacente des politiques publiques de gestion du foncier pastoral, alors que celle-ci est au cœur des transformations du pastoralisme au vu des évolutions des contextes locaux et régionaux .
Depuis une quinzaine d’années, une prise de conscience des gouvernements et des partenaires techniques et financiers s’est faite pour soutenir le développement des zones pastorales et ainsi la mobilité des troupeaux.
Ces constats nous amènent à dire que la question foncière se trouve au centre des défis et enjeux d’accès aux ressources, aux droits et à l’espace. Le défi majeur aujourd’hui est de pouvoir mettre en place des dispositions juridiques adaptées aux espaces pastoraux et agro-pastoraux fondées sur des outils et bonnes pratiques locales. Cette problématique a conduit l’IPAR et la GIZ à mener une étude dans la Bassin arachidier (régions de Kaolack et Kaffrine) afin de parvenir à une formulation d’une proposition de réforme sur le foncier pastoral fondée sur des outils et bonnes pratiques locales.
Le bassin arachidier est une zone particulière qui permet de mener une telle réflexion. En effet, il constitue une zone de transhumance qui accueille le troupeau en transhumance venant de la zone sylvo-pastorale et du ferlo, d’une part et d’autre part, cette zone détenant de vastes potentiels de terres agricoles suscitent beaucoup de plus en plus l’appétit foncier des investisseurs agricoles et compte non tenu des nombreux projets infrastructurels de l’Etat qui grignotent les espaces dédiés au pastoralisme (autoroute, université, programme 100 000 logements etc…).
OBJECTIFS ET RÉSULTATS ESCOMPTÉS
Objectif général
L’objectif global de cette étude est d’aboutir à des propositions pertinentes de réforme fondées sur des outils et bonnes pratiques locales permettant de sécuriser les droits fonciers des éleveurs tout en favorisant une coexistence pacifique avec les autres acteurs. Il s’agira notamment de formuler des stratégies de gestion concertée des ressources pastorales et des pistes de solutions locales face aux menaces et occupations abusives des espaces vitaux dédiés au pastoralisme.
Objectifs spécifiques :
Cette étude vise spécifiquement à :
- Analyser le contexte de la fragilisation des droits fonciers des éleveurs ;
- Examiner la portée et les limites des politiques publiques ainsi que des textes juridiques régissant le pastoralisme et la gestion foncière face au défi de la sécurisation du foncier pastoral (acquis enregistrés, insuffisances et difficultés rencontrées dans l’application de ces différents instruments) ;
- Evaluer les forces et faiblesses des modèles de sécurisation du foncier pastoral, avec un accent particulier sur les enseignements à retenir (leviers de réussite des expériences, facteurs d’échec et rôle joué par les organisations d’éleveurs) ;
- Capitaliser les outils et bonnes pratiques locales existantes spécifiquement leurs contextes de mise en place, les réussites ou échec ;
- Identifier et formuler des stratégies de sécurisation du foncier pastoral.
MISSION ET TACHES DU CONSULTANT (E)
Les tâches suivantes sont attendues pour être réalisées par le consultant :
Le consultant conduira toute l’étude sous la supervision du Responsable de la thématique gestion des ressources naturelles et foncières de l’IPAR. Dans le cadre de cette étude, le Consultant va réaliser les tâches suivantes :
- Etablir un chronogramme réel et prévisionnel de la conduite de l’étude ;
- Procéder à la revue documentaire à travers un travail de collecte et d’analyse de documents.
- Former et superviser l’équipe des enquêteurs qui seront déployés sur le terrain ;
- Procéder à l’analyse des données collectées
- Restituer les résultats de collectes dans les communes ou départements de la zone d’intervention du projet Seen Suuf (échelle communale risque d’être contraignante) ;
- Produire le rapport de recherche ;
- Animer l’atelier national multi-acteur de restitution ;
- Elaborer une note politique sur la base des résultats de recherche.
LIVRABLES ATTENDUS
Le consultant devra produire les livrables suivantes :
- Un document de revue de littérature faisant l’état des lieux de la fragilisation des droits fonciers des éleveurs, des pratiques foncières pastorales et des limites des politiques publiques et des législations spécifiques à l’élevage ;
- Une note de capitalisation des outils et bonne pratiques pastorales locales ;
- Un rapport d’analyse faisant ressortir :
o Les forces, faiblesses et réussites des modèles de sécurisation du foncier pastoral ;
o Des propositions de stratégies de gestion concertée des ressources pastorales ; - Une note politique sur la base des résultats de recherche.
PROFIL DU CONSULTANT (E) INDIVIDUEL (le) :
- Le consultant doit remplir les critères suivants :
- Disposer d’une parfaite connaissance du pastoralisme au Sahel en général et du Sénégal en particulier ;
- Justifier d’une solide expérience sur les thématiques de la protection des ressources pastorales et de la transhumance ainsi que du foncier ;
- Solide expérience (au moins 7 ans) en matière de documentation et capitalisation des résultats de projets d’appui aux communautés rurales, de collecte de données d’enquêtes et de capitalisation ;
- Expérience de travail avec les communautés agropastorales et les organisations d’éleveurs ;
- Capacités avérées d’animation de processus participatifs ;
- Bonnes capacités rédactionnelles et de synthèse.
DUREE DE LA MISSION
La durée prévue pour cette mission est fixée à trois (03) mois à compter de la date de signature du contrat.
MODALITES DE SOUMISSION
Les Consultants intéressés sont invités à soumettre une offre technique et financière séparée. L’offre technique comportera :
- Un curriculum vitae (CV) insistant sur les expériences et compétences en lien avec la mission avec au moins trois (03) références des travaux réalisés ;
- Une note synthétique de compréhension de la mission ;
- Une description de l’approche et de la méthodologie ;
- Un plan de travail incluant un chronogramme prévisionnel mentionnant les différentes phases du déroulement de la mission.
L’offre financière déclinera dans un document séparé et en détail le budget pour les différentes étapes en précisant les coûts unitaires.
DATE LIMITE & LIEU DE REMISE DES CANDIDATURES
Pour postuler, nous vous prions de soumettre votre candidature au plus tard le 15 décembre 2023 à 23h 59 temps universel, par courriel à l’adresse : recrutement@ipar.sn avec objet « Recrutement d’un(e) Consultant(e) spécialisé (e) en Pastoralisme et en Transhumance ».
Les candidatures incomplètes ainsi que celles envoyées après la date limite ou ne respectant pas la procédure ne seront pas prises en considération.