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IPAR Think Tank à l’école des négociations sur le climat et la transition agroécologique

Gorée, l’île historique au large de Dakar, a accueilli une importante rencontre de la DyTAES, du 9 au 11 décembre 2025 pour aiguiser l’expertise de son Comité technique sur le changement climatique et la transition agroécologique.

Engagée dans la Dynamique pour une Transition Agroécologique au Sénégal (DyTAES), à travers le Comité de pilotage et le Comité technique de cette dernière, IPAR Think Tank a pris part à l’atelier de renforcement de capacités sur le cadre international du changement climatique et ses articulations avec l’agroécologie. Cette formation a été suivie d’un exercice de capitalisation du parcours de la DyTAES. Le think tank y était représenté par Dr Sidy Tounkara, Chercheur et coordonnateur de projets, et Monsieur Chérif Sambou Bodian, Chargé de projets et de Plaidoyer.

Les négociations climatiques se tiennent tous les ans dans la grande cour internationale de la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC). Elles sont de plus en plus complexes et difficiles d’accès aux non-initiés. C’est pourquoi, dans l’esprit d’une gouvernance climatique participative et inclusive, il est pertinent de renforcer les capacités de compréhension et d’actions des Organisations de la Société Civile (OSC) pour une meilleure prise en compte des préoccupations des communautés à la base à partir des territoires. L’enjeu majeur est l’accès des « sans voix » à la table des négociations climatiques. Juridiquement exclues des organes de décisions qui engagent les Etats, les OSC doivent être davantage outillées pour agir en amont auprès de leurs Gouvernements afin que ces derniers les entendent et intègrent leurs préoccupations lors des négociations internationales.

Cette formation théorique et pratique (simulation de délégations pour conduire les négociations climatiques à la Conférence des Parties (COP)) a permis aux participants de mieux comprendre la sinuosité des mécanismes de négociations climatiques qui fluctuent au gré des intérêts, visibles ou cachés, des membres de la COP qui affûtent des stratégies pour les sauvegarder, parfois au détriment de l’objectif de réduction de l’émission des gaz à effet de serre responsables des changements climatiques. Le défi majeur est relatif à des engagements juridiquement non contraignants qui sont, très souvent, suivis d’impacts très limités (ou pas du tout) car les engagements financiers ne suivent pas toujours pour prendre en charge les politiques d’adaptation et d’atténuation. A titre d’exemple, la Banque mondiale estime à 18 milliards USD par an les besoins de financement de l’adaptation pour l’Afrique subsaharienne entre 2010 et 2050. Selon l’Organisation de Coopération et de Développement Economiques (OCDE), la finance climatique a atteint 80 milliards de USD pour les pays en développement alors que les besoins se chiffrent entre 140 et 170 milliards USD d’ici à 2030, soit un gap financier de 60 à 90 milliards USD.

Par ailleurs, la question de justice climatique, nécessaire pour les pays les moins avancés et moins émetteurs de gaz à effet de serre (3 à 4%), est une considération essentielle pour donner plus de chances de réussite aux négociations climatiques. En cas de mise en place de divers fonds verts, la question de l’accès est une contrainte majeure du fait, en partie, de l’expertise limitée des prétendants. Pourtant, « les effets du changement climatique pourraient réduire le PIB du Sénégal de 9,4% d’ici à 2050. Les investissements nécessaires à l’action climatique sont estimés à 1,36 milliard de dollars par an jusqu’en 2030 et à 530 millions de dollars par an entre 2031 et 2050. À elle seule, l’adaptation pourrait accroître le PIB du Sénégal d’au moins 2% d’ici à 2030 et réduire la pauvreté induite par le climat de 40% » selon la Banque mondiale.

Forts de ces éléments de réalisme économique et climatique, les participants à cette rencontre ont réfléchi également aux articulations avec les questions de transition agroécologique. En effet, comment la transition agroécologique peut-elle être davantage intégrée aux négociations climatiques et faire du secteur agricole, très émetteur de gaz à effet de serre (25%) dommageables pour le climat, un pilier important de la lutte contre les changements climatiques ? A cette question, la DyTAES, en tant qu’OSC, a un grand rôle de plaidoyer à jouer auprès du Gouvernement sénégalais pour faire entendre les voix et suivre les voies des communautés. Mais, encore faudrait-il qu’elle en ait les capacités pour jouer dans la grande cour internationale de la diplomatie climatique.

Les participants se sont intéressés aussi à la vie de la DyTAES en jetant les bases du processus de capitalisation de son parcours et celui de ses déclinaisons territoriales. A travers une discussion ouverte et structurée, plusieurs éléments caractérisant le parcours de la DyTAES et des DyTAEL ont été analysés : 1) contexte d’émergence et stratégies de mobilisation de ressources ; 2) résultats, facteurs de réussite, limites et conditions de durabilité ; 3) enseignements et identification des prochaines étapes pour 2026.